Rappel des droits relatifs aux œuvres graphiques originales des artistes-auteurs.
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La maison des artistes
L’Ailiance Française des designers : l’œuvre de commande
L’Alliance Française des designers : Propriété intellectuelle
L’Alliance Française des designers : La mention “tous droits cédés”
L’alliance Française des designers : PI et appels d’offres
Principe
Le designer, quelle que soit sa discipline, créé une œuvre de commande. Comme toute œuvre, elle s’inscrit dans le cadre de la propriété intellectuelle. Le designer en détient les droits d’auteur. De ce fait, nul ne peut utiliser son œuvre sans son consentement explicite. Dans le cadre de la commande, ce n’est pas l’œuvre elle-même qui est vendue, mais son droit de reproduction pour un usage défini et limité dans le temps par contrat. Cela signifie qu’un commanditaire ne peut reproduire une création (une image ou un volume) sans accord préalable avec le designer.
• Pour concéder à un tiers le droit de reproduire son œuvre, le designer doit réaliser une cession de droits précisant dans le temps et l’espace la nature des droits cédés. Il en est de même de son droit de représentation qui consiste dans la communication de l’œuvre au public par un procédé quelconque notamment par Internet.
• Si le principe du droit d’auteur est simple, l’appliquer demande d’en connaitre les subtilités en amont de toute commande.
Qui est concerné ?
Le droit d’auteur, régit par le Code de la Propriété Intellectuelle, permet à l’artiste-auteur d’autoriser ou non l’exploitation de ses œuvres et de percevoir en contrepartie une rémunération : cession de droit d’auteur.
Du seul fait de leur création et portant l’empreinte de la personnalité de leur auteur, les œuvres énumérées à l’article L112-2 du CPI (œuvres musicales, audiovisuelles, graphiques et plastiques, photographiques, logiciels, d’arts appliqués, d’architecture…) sont protégées par le droit d’auteur.
Comment cela fonctionne ?
1 droit moral
• 3 caractéristiques : inaliénable, incessible, perpétuel.
• 4 attributs : paternité (L121-1), respect/intégrité (L121-1), divulgation (L121-2), repentir/retrait (L121-4).
3 droits patrimoniaux (Jusqu’à 70 ans après la disparition de l’artiste)
• Droit de reproduction : autorisation ou interdiction de la communication indirecte de l’œuvre au public par tous procédés et sur tous supports. (L122-3 CPI)
• Droit de présentation : autorisation ou interdiction de la communication de l’œuvre au public de manière directe ou indirecte (télédiffusion, Internet, (L122-2 CPI)
• Droit de suite : perception d’un % sur le prix de revente de l’œuvre par les commerces d’art, les SVV, etc.) (L122-8 C
La mention « Tous droits cédés »
À propos d’une clause, que l’on voit circuler de plus en plus dans les contrat soumis aux designers : « Le créateur cède irrévocablement et à titre exclusif à la société XXX l’ensemble de ses droits patrimoniaux, à savoir le droit d’exploitation, de représentation, de reproduction et d’adaptation sur les créations objet du présent devis, sur tous supports, en tous formats, sans limitation de quantités, dans le monde entier et pour la durée desdits droits, pour un montant de… »
La mention « Tous droits cédés » peut être considérée comme une position abusive de la part de votre client, et n’a pas de valeur au regard de la loi sur la propriété intellectuelle si il n’y a pas d’indication de durée, de zone géographique et de prix sur cette cession.
L’article L. 131-3. du code de la propriété intellectuelle dispose que « La transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée. »
- La clause que vous me soumettez énumère les droits cédés : droit d’exploitation, de représentation, de reproduction et d’adaptation sur les créations objet du présent devis.
- Le domaine d’exploitation des droits cédés est délimité quant au lieu et à la durée : le monde entier et pour la durée desdits droits, c’est à dire la durée de protection des droits d’auteur.
- Le domaine d’exploitation des droits cédés ne semble pas délimité quant à son étendue et à sa destination. En effet, selon la clause en question la cession est faite sur tous supports, en tous formats, sans limitation de quantités.
- Pourrait-il être jugé qu’une telle clause n’est pas valable en raison de l’imprécision et de la généralité de ses termes contraires aux dispositions de l’article L 131-3 du code de la propriété intellectuelle.
Il est vrai qu’il est fréquemment jugé que les clauses telles que « tous droits cédés, sans limitation de durée » sont dénuées de toute portée. - Je pense cependant que, compte tenu des précisions données quant aux droits cédés et quant au lieu et à la durée, il est probable qu’ un tribunal jugerait la clause en question valable estimant que l’auteur a été suffisamment éclairé.
- Il convient cependant de souligner que cette clause ne sera valable que si la contrepartie financière est sérieuse.
Je réserve les situations où la loi impose une rémunération proportionnelle aux produits d’exploitation. - Mais, en toute hypothèse, malgré la cession du droit d’adaptation, le cocontractant ne sera pas en droit de dénaturer l’œuvre, ce qui constituerait une atteinte au droit moral de l’auteur qui est inaliénable (article L 121-1).
Maître François Lesaffre, avocat spécialiste du droit d’auteur
PI et appels d’offres
« L’administration bénéficie des droits de représentation, de reproduction et d’adaptation sur la charte graphique sans limitation dans le temps, de lieu, d’étendue et de destination. Les prix s’entendent tous droits et achats d’art inclus. En tout état de cause, le titulaire de la charte prémunit la CCI du Mans et de la Sarthe contre toute revendication des tiers quant aux droits de propriété intellectuelle et lui en garantit l’exercice paisible. » Marché n°DG 016-2005 – Création d’une charte graphique CCAP, Chambre de Commerce et d’Industrie du Mans & de la Sarthe.
Cette clause est critiquable au vu du code de la propriété intellectuelle qui tient à ce que, en cas de cession, l’attention de l’auteur soit attirée sur l’étendue de la cession de droit, de telle sorte que la réalité de son consentement soit assurée. S’il est question de cession de droits d’auteur c’est uniquement de manière sous-entendue.
« L’administration bénéficie des droits » et « les prix s’entendent tous droits […] inclus » est-il écrit : mais des droits appartenant à qui ? Les droits d’auteur naissent en la personne de l’auteur. Avant que l’administration en bénéficie encore faut-il qu’elle les acquière.
L’article L 131-3 dispose que le domaine d’exploitation des droits cédés doit être délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
Notamment, une clause prévoyant que la cession est consentie pour la durée légale de protection des droits d’auteur, telle qu’elle est définie par le Code de la propriété intellectuelle, est valable puisque la durée a été précisée. La clause en question prévoyant que l’administration bénéficie des droits sans limitation dans le temps paraît contestable. Il en est de même pour les autres paramètres qui ne sont nullement définis positivement mais seulement négativement si je puis dire puisqu’il est question d’absence de limitation, ce qui ne me semble pas répondre aux vœux de la loi, d’autant plus, encore une fois, que la chose est vue du côté de l’administration qui bénéficie de droits mais non du côté de l’auteur, ce qui est en contradiction avec l’approche personnaliste du droit d’auteur français (et même européen). Le droit d’auteur, c’est la défense de l’œuvre et de son auteur, titulaire de prérogatives morales et patrimoniales. Il faudrait voir, s’il y avait lieu d’approfondir la question, tous les documents contractuels, d’autres pouvant être plus précis quant à la question de la cession des droits d’auteur.
Il est question du « titulaire » de la charte qui doit prémunir la CCI du Mans contre toute revendication de tiers. Je pense que le mot « titulaire » a été employé par erreur à la place « d’auteur » de la charte. L’erreur pourrait permettre de faire juger que cette dernière phrase doit être considérée comme non écrite.
Le tribunal administratif pourrait être compétent pour juger de la question de savoir si un auteur, ayant répondu à l’appel d’offre de l’administration, lui a cédé ses droits d’auteur. Mais le Tribunal éventuellement saisi de la question, qu’il s’agisse du Tribunal de Grande Instance ou du Tribunal Administratif, se doit d’ appliquer les dispositions du code de la propriété intellectuelle, lesquelles, en l’occurrence, tendent à dire que pareille cession est nulle.
Maître François Lesaffre, avocat spécialiste du droit d’auteur